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Portrait de Mathilde Bouclé-Bossard

Mathilde Bouclé-Bossard

Professeure des écoles, présidente des Anneaux de la mémoire

De quand date votre engagement dans cette association ?

« Je suis entrée dans l’association en 2006 par un stage de fi n d’étude de six mois, qui a débouché sur un emploi. Je suis restée salariée jusqu’à fin 2015. Je n’avais pas de formation en Histoire. J’ai fait des Langues Étrangères Appliquées suivies d’un diplôme à l’IRIS (Institut des Relations Internationales et Stratégiques) à Paris. Ma formation s’intitulait ‘Les Métiers de l’Humanitaire’ et j’avais été attirée par le côté international de l’association. C’est en travaillant aux Anneaux de la mémoire que j’ai vraiment découvert l’histoire de Nantes en tant que ville négrière, puisque je ne me souviens pas avoir eu au collège des informations sur la traite ou Saint-Domingue, l’impact que ça a pu avoir sur la Révolution française… Quand j’ai quitté mon emploi au sein de l’association, j’y suis restée à titre bénévole et j’ai succédé à Yvon Chotard, le président fondateur, il y a trois ans. »

Pourriez-vous résumer l’action de l’association ?

« Je la résume en trois grands axes : l’international, l’artistique et le pédagogique. Dès 1992, les Nantais ont compris que cette histoire intéressait toute la France et même au-delà. Une délégation du Bénin est venue voir l’exposition, une autre de Liverpool (elle s’en est inspirée pour l’International Slavery Museum), et puis des Antillais, des Africains…L’association s’est ensuite investie dans la Route de l’esclave, sous l’égide de l’UNESCO, et a commencé à tisser des partenariats en Afrique, aux Antilles ou encore en Amérique du Nord. Pour ne citer qu’un de nos grands projets, nous avons obtenu en 2014 un financement élevé pour un programme appelé Tostem (Tourisme autour des sites de la traite, de l’esclavage et de leurs mémoires), élaboré avec des partenaires au Cameroun, au Sénégal, en Haïti et en Antigua-et-Barbuda. Le projet a abouti à la mise en valeur de sites dans ces pays et à l’élaboration d’une exposition internationale, à la fois historique et artistique, Mémoires Libérées, accessible au grand public, qui a tourné dans chaque pays. Cette collaboration entre les trois continents a impliqué aussi bien des personnes de la société civile que des artistes et des chercheurs, des historiens. La revue des Cahiers des Anneaux de la Mémoire, revue scientifique éditée à partir de l’an 2000, fait quant à elle appel à des spécialistes du monde entier. Quant au volet artistique, nous travaillons avec des artistes contemporains, aussi bien dans le domaine de l’art visuel que du spectacle vivant, pour faire passer des messages plus difficiles d’accès. Le volet pédagogique est également présent depuis le début. Des dizaines de classes d’écoles nantaises ont visité l’exposition de 1992. Le travail a continué, aussi bien par des visites guidées dans Nantes que par une exposition et une mallette pédagogiques que les collèges pouvaient nous louer. L’association veut rendre cette histoire accessible à tous les publics. Nous avons longtemps fait des conférences à l’Université Permanente, et nous proposons régulièrement des conférences grand public. »

Où en sommes-nous selon vous en France sur la question de la mémoire de l’esclavage ?

« On a bien avancé depuis 1992, c’est devenu beaucoup plus facile d’aborder la question. Il y a eu la loi Taubira de 2001, la fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, avant ça le CNMHE (Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage)… De plus en plus d’associations se montent, aussi bien au fort de Joux dans le Jura, par rapport à l’histoire de Toussaint Louverture, qu’à Bordeaux. Il y a aussi des centres de recherche et des historiens qui travaillent sur cette thématique. Donc ça avance, mais il ne faut pas rester sur ces acquis. Nous devons continuer à travailler cette histoire et même aller plus loin. »

Propos recueillis par Pascaline Vallée en mai 2022